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Maurice COUSIN, comte de Courchamps
(vers 1777, Saint-Servan, Ile-et-Vilaine - 1859)



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Quatorze ans après la Physiologie du goût de Brillat-Savarin, Cousin ou Courchamps – l’un ou l’autre nom sont utilisés – publie, en 1839, une Néophysiologie du goût, ou, dans l’édition de 1853, un Dictionnaire général de la cuisine française ancienne et moderne, titre générique suivi d’un autre titre longuement explicité : De l’Office et de la pharmacie domestique, ouvrage où l’on trouvera toutes les prescriptions nécessaires à la confection des aliments nutritifs ou d’agrément à l’usage des plus grandes et des plus petites fortunes ; Publication qui doit suppléer à tous les livres de Cuisine dont le public n’a que trop expérimenté le charlatanisme, l’insuffisance et l’obscurité ; Enrichi de plusieurs menus, prescriptions culinaires, et autres opuscules inédits de M. de la Reynière, Auteur de l’Almanach des Gourmands1 ; Suivi d’une collection générale des menus français depuis le douzième siècle, et terminé par une pharmacopée qui contient toutes les préparations médicinales dont l’usage est le plus utile et le plus familier.2 Le livre fait 635 pages.

En fait, l’ouvrage fut publié sans faire parler de lui, dans la mesure où son auteur resta anonyme. « Il en eût peut-être été autrement si son auteur, qui passait alors pour un gastronome des plus distingués, avait signé son œuvre. Cette Néophysiologie du goût est, en effet, assez intéressante ; elle n’a pas la sécheresse ordinaire du livre de cuisine, elle n’en a pas non plus la banalité. Ça et là, dans les colonnes de cette sorte d’encyclopédie de la gourmandise, à côté des recettes pratiques, se rencontrent des anecdotes piquantes.» (Quérard)

Voici deux extraits provenant de recettes et remarques « empruntées » au célèbre La Reynière, que cite Maurice Cousin dans le titre de son dictionnaire :

Asperges à la Pompadour3 ([…] d’une délicatesse exquise, d’une simplicité charmante et d’une élégance parfaite) […] Sauce : Videz un moyen pot de beurre de Vanvres4 ou de la Prévalais5 en en prenant le contenu par cuillerées et en le mettant dans une casserole d’argent : joignez-y quelques grains de sel avec une forte pincée de macis en poudre, une demi-cuillerée de fleur de farine d’épeautre, et de plus deux jaunes frais bien délayés avec quatre cuillerées de suc de verjus muscat. Faites cuire ladite sauce au bain-marie, en évitant de l’allourdir en lui laissant prendre trop d’épaisseur : mettez vos morceaux d’asperges tranchés dans ladite sauce, et servez le tout ensemble en casserole couverte et en extra, pour que cet excellent entremets ne languisse point sur la table, et puisse être apprécié dans toute sa perfection. Cette intéressante formule nous est parvenue des archives de M. Grimod de la Reynière, qui l’avait eue par succession de son grand-oncle, M. de Jarente, ministre d’État pendant la faveur de madame de Pompadour. L’auteur du manuscrit original a eu soin d’observer que ces asperges à la Pompadour doivent se servir à la cuillère, et se manger à la fourchette.

Cerises. On fait avec les cerises, surtout dans leur primeur, d’excellentes compotes ; on en fait aussi d’assez bonnes confitures ; on les dessèche au four, on les botte avec du sucre fin, on les met à mi-sucre, on les met en conserve ; on les prépare à l’eau-de-vie, en dragées ; on en garnit les tourtes d’entremets ; enfin c’est un des fruits qui offre plus de ressource aux officiers6, et surtout aux confiseurs.

*

Si mon insistance a porté sur cet ouvrage-là, ce n’est pourtant pas le seul signé de Cousin. En 1838 était en effet paru : Les Nuits de Berlin, suivies d’un Tableau de l’état général du Protestantisme en Europe et dans les missions protestantes. En fait, il semble qu’il s’agisse d’une traduction de l’allemand, et que le texte soit considéré comme un plagiat.

En revanche, c’est bien Maurice Cousin qui est le véritable auteur de mémoires titrés Souvenirs de la Marquise de Créquy (1710-1802), de 1834 à 1836. Le comte de Courchamps aurait brodé avec bonheur et talent sur des souvenirs véritables mais à l’origine d’une grande banalité.



Nicole CHOLEWKA

Bibliographie :

Joseph-Marie Quérard, les Supercheries littéraires dévoilées, 1847 (date pour cette partie de l’œuvre ; en ligne). Cet ouvrage est une « Galerie des écrivains français de toute l’Europe qui se sont déguisés sous des anagrammes, des astéronymes, des cryptonymes, des initialismes, des noms littéraires, des pseudonymes facétieux ou bizarres, etc.» [les astéronymes sont des noms d’astres, et les cryptonymes… des pseudonymes, note de NC.]

Textesrares.com (en ligne)

Georges Vicaire, Bibliographie gastronomique, 1890. [recense plus de 2500 ouvrages parus sur le sujet entre le XVe et le XIXe s.]



Notes

1 Premier ouvrage offrant un itinéraire des cafés et des restaurants, par le célèbre gastronome.

2 Il est ajouté : Dédié a [sic] l'auteur des Mémoires de la marquise de Créquy. Lequel auteur n'est autre que… lui-même !

3 Cette recette est également rapportée dans le livre de cuisine d'Alexandre Dumas. Et Courchamps y est cité à plusieurs reprises.

4 Aujourd'hui Vanves.

5 Beurre salé d'une région de Bretagne. Les deux beurres cités étaient alors très estimés.

6 Il s'agit ici, employé au pluriel, de l'ancien sens de " personnel officiant en cuisine ".