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Humaniste,
grammairien et homme de lettres français, Laveaux commença ses
études littéraires dans sa ville natale, Troyes, où d’ailleurs il n’obtint
pas de très bons résultats, pour les achever brillamment à Paris.
Son expérience en langue germanique
Laveaux fut tout d’abord professeur de langue française à Bâle,
puis enseigna la littérature française et devint membre de l’Académie
Caroline à Stuttgart. Par la suite, Frédéric II, qui appréciait ses talents,
le fit venir à Berlin afin de lui confier une chaire à l’université de
cette ville. Laveaux qui maîtrisait parfaitement la langue allemande,
participa à de grands travaux sur la Monarchie prussienne sous Frédéric-le-Grand,
publiés en 1788. Ceci lui conféra le titre honorifique d’historien du
grand roi.
L’engagement révolutionnaire
Après la mort de ce prince, et donc au moment où éclate la révolution
française, il regagna la France et s’établit à Strasbourg afin de ne pas
rester étranger à ces grands événements auxquels il croyait. Le libraire
Treuttel lui confia alors la direction du journal politique et littéraire
Le Courrier de Strasbourg (1791-1792). Mais, ses opinions politiques
très marquées l’obligèrent à quitter l’Alsace. Laveaux, jacobin
enragé, clamait en effet son mépris envers l’église et le clergé, ce qui
lui valut évidemment de nombreux ennemis.
Il s’établit alors à Paris en 1792. Après le 10 août de cette même année,
l’Assemblée législative le nomma membre du tribunal instauré le 17 août,
pour juger ceux qui avaient pris la défense du roi. Son attitude, en cette
occasion, fut dénuée de tout excès. Pendant la terreur, il devint rédacteur
en chef du Journal de la Montagne (1793-1796).
Ses articles, témoignant fortement de son ardeur politique, lui coûtèrent
de nombreuses dénonciations, incarcérations et libérations. Désappointé
et déçu par la politique, il renonça au rôle de journaliste et revint
alors à ses goûts littéraires, en traduisant notamment des ouvrages allemands.
Un grammairien lexicographe
Il fut successivement professeur des langues anciennes, chef de bureau
à la préfecture de la Seine sous le consulat et inspecteur général des
prisons et hospices de ce département sous l’Empire. C’est à cette époque
qu’il rassembla les matériaux de son Dictionnaire de la langue française,
édité après vingt années de travail. Ses différents postes lui laissèrent
le temps de coordonner ses travaux et de les publier.
A la seconde restauration, il fut destitué et il mourut à Paris à l’âge
de 78 ans.
C’est en tant que grammairien et lexicographe que Laveaux se fit
connaître. Son premier ouvrage fut le Dictionnaire raisonné des difficultés
grammaticales et littéraires de la langue française, publié à Paris
en 1818, correspondant à un volume in-8° (troisième édition par Marty-Laveaux,
1844, 8°).
Dans cet ouvrage élaboré avec goût et sagacité, Laveaux apparaît
extrêmement puriste et conservateur. Son dictionnaire constitue cependant
un travail remarquable et beaucoup plus personnel que celui de Boiste.
Quant à son Nouveau dictionnaire de la langue française, où l’on
trouve tous les mots de la langue usuelle, les étymologies, l’explication
détaillée des synonymes, etc., publié à Paris en 1820 (in-4° ; seconde
édition, Paris 1828, deux volumes, in-4°), il donne l’occasion à Laveaux
de juger sévèrement celui de l’Académie Française, trop préoccupée,
selon lui, à inventer des phrases, plutôt que de citer des exemples empruntés
aux auteurs reconnus.
Pourtant, le Dictionnaire de Laveaux mentionne peu d’écrivains et ne prend
absolument pas en compte le XIXe siècle. Mais, par l’exactitude et la
rigueur de ses définitions, le dictionnaire de Laveaux est à l’origine
des dictionnaires modernes.
On lui doit aussi un Dictionnaire synonymique de la langue française
(Paris 1826, deux tomes ou un volume, in-8°). Cet intitulé lui semble
plus approprié que celui de « Dictionnaire des synonymes » puisque ce
dernier ne regroupe pas vraiment des mots synonymes, qui n’existent pas,
mais des mots dont les sens présentent des ressemblances partielles. De
plus, l’édition de 1802 du Dictionnaire de l’Académie française, augmenté
de plus de vingt mille mots, fut éditée à Paris en 1842.
Laveaux est également l’auteur de nombreux autres ouvrages, dont
la liste ci-après donne une idée de la variété : Le Maître de langues
ou Remarques sur quelques ouvrages français écrits en Allemagne, Berlin
1783, Leipzig 1786, in-8° ; Tableaux philosophiques, historiques et
moraux, première partie, Berlin 1783, in-12° ; Cours théorique
et pratique de langue et littérature françaises, ouvrage entrepris par
l’ordre du roi de Prusse, Berlin 1784, in-8° ; Dictionnaire français-allemand
et allemand-français, 1784-1785, deux volumes, in-8° ; Les vrais
Principes de la Langue Française, oder neue franz. Grammatik, Berlin
1785, in-8° ; Leçons méthodiques de Langue Française pour les Allemands,
Stuttgard 1787, 1789, in-8° et Tubingue 1790, in-8° ; Vie de Frédéric
II, roi de Prusse, Strasbourg 1788, sept volumes, in-12° ou in-8°
; Frédéric II, Voltaire, J-J Rousseau, d’Alembert et l’Académie de
Berlin vengés du secrétaire particulier de cette académie, Paris 1789,
in-8° ; Histoire de Pierre III, empereur de Russie, trouvée dans
les papiers de Montmorin, Paris 1799, trois volumes, in-8° ; Nouveau
Dictionnaire Français-Allemand et Allemand-Français, Paris 1803, deux
volumes, in-4°.
Laveaux a par ailleurs traduit du latin l’Eloge de la folie,
d’Erasme (1782, in-8°) et de l’allemand Muserion, ou le Philosophe
des Grâces, de Wieland (1784, in-8°).
Laveaux reste à nos yeux un grammairien et lexicographe de qualité,
auteur de notre premier grand dictionnaire de difficultés grammaticales.
Laurence GANDOLFO
Sources bibliographiques :
- HOEFER,
J.C.F., Nouvelle biographie générale etc., quarante-six tomes,
1852.
- DEZOBRY,
L.C., et BACHELET, J.L.T., Dictionnaire général de biographie,
etc., deux tomes, cinquième édition, 1869.
- DANTES,
A. (pseud.), Dictionnaire biographique…des hommes les plus remarquables,
etc., 1875.
- SOCARD,
E., Biographie…de Troyes et…de l’Aube, 1882.
- SITZMANN,
E., Dictionnaire de biographie des hommes célèbres de l’Alsace,
etc., deux tomes, 1909-1910.
- QUEMADA,
B., Les Dictionnaires du français moderne, Paris, Didier,
1968.
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